CHEIKHNA CHEIKH  MOUHAMMAD FADIL,(1211-1286 Hegire)
MAITRE MYSTIQUE ET PERE DE CHEIKHNA CHEIKH SAADBOUH.

L’une des principales sources de renseignement sur la vie de cet homme de DIEU provient du manuscrit intitulé « Ad -Diyyâ ‘al bîn fî Karâmât Shaykh Muhammad Fâdil  b. Mâmine. Ms. IMRS Nouakchott. C’est une œuvre écrite par un disciple et contemporain  du Cheikh en l’occurrence Cheikh Mouhammad Fâdil Ibn Lahbîb AL YA’QUBI.
En parcourant ce texte Rahal  BOUBRIK écrit : « Muhammad Fâdil n’avait pas de maître, hormis son père. Un saint comme lui n’avait besoin de personne : c’est Dieu qui l’initia à toutes les sciences, et l’acquisition du savoir fut intégrée dans ses karâmâts, puisque, depuis son enfance et même avant sa naissance, il était prédestiné à un statut de sainteté unique. C’est ainsi que les récits écrits et oraux – internes abordent la question de la formation de Muhammad Fâdil. La lecture du texte hagiographique de son disciple, qui certes, n’échappe pas à la logique des discours typiques de l’historiographie locale, fournit cependant des renseignements sur la formation de Muhammad Fâdil.

         D’après Ad -Diyyâ, Muhammad Fâdil fut conduit à l’âge de 5 ans, par ses parents auprès de Muhammad al-Mukhtâr b. Lahbûs b. Abî Bâkr pour apprendre le Coran. Il étonna son maître et ses condisciples par sa rapidité extraordinaire d’assimilation du Coran, si bien que son maître  refusa de recevoir le prix de son enseignement (ajr). Dans la même école, Muhammad Fâdil apprit les récits biographiques (as-sîra) des prophètes et des saints (al-‘awliyâ’). Cette période dura deux ans et, à l’âge de 7 ans, il commença son initiation mystique, sans avoir recours à aucun autre maître que son père, qui prit en charge cette tâche importante dans le devenir d’un saint : « A 7 ans, il fit allégeance (bay’a) à son père pour qu’il le mène dans la voie de Dieu, et pour atteindre entre ses mains le statut des saints parfaits (al-awliyâ’ al -kummal) ; son père lui enseigna donc le « mot incommensurable » (‘ism al-‘a’zam), les secrets de l’initiation (‘asrâr) et les hikam (formules magiques) ; il était sous son autorité, obéissant à ses ordres et suivant ses désirs . »

        Les signes réels de sainteté se manifestèrent chez Muhammad Fâdil à partir de cette période d’initiation mystique. Son entourage vit en lui un être exceptionnel, ses cousins et ses proches cherchèrent sa bénédiction. Il resta au côté de son père pendant huit ans en se consacrant à l’éducation spirituelle (tarbiyya ar -rûhiyya) ; ce stade de formation s’acheva le jour où « son père lui donna sa licence (ajâzahu), le libéra de ces contraintes (faqqa ‘anhu al-hajra) et lui donna son turban (amâmatuh), en lui disant : va où tu veux ou reste si tu veux, à partir d’aujourd’hui, je n’ai plus de droit sur toi. »
Dans le commentaire de la Mandhoumat al-Afkâr, ouvrage attribué au Cheikh de Nimzaat, fait par un de ses disciples du nom de Cheikh Abdallâh ben Salâh ben El-Mokri El-Djamrî El-Hoseïnî El-Mâliki El-Ach’arî El-Djoneïdî et traduit de l’arabe par L. Bouvat, publié dans la Revue du Monde Musulman (1916- n° 18), on peut lire, à propos de Cheikh Mohammad FADEL :
 «Cheikh Mohammed Fadel, chef de la branche des Kaderia, dont le centre principal est la région comprise entre le Tagant et l’Atlantique, entre l’Adras Et-Temar et le Tirés, a été un personnage considérable. Jurisconsulte et théologien estimé, mentionné plusieurs fois par Senoussi, il appartenait à ces Chorfa de Oualata si influents dans la région, et ses fils, connus également par leurs ouvrages théologiques, continuent son œuvre. La branche des Kaderia, dont il est le chef, n’a pas moins d’importance que celle de Cheikh Sidia (I).
Ce fut réellement un saint parfait, wâli, kâmil. Connaissant à fond les sciences religieuses, il savait le Coran par cœur, possédait de manière impeccable la Sounna et les Hadîths, et servait d’exemple en toutes choses, par son austérité et son exactitude à remplir toutes les prescriptions religieuses, la prière, le jeûne et l’aumône. Il disait un jour à Cheikh Saadibouh : « O mon fils, autrefois je rougissais des anges ; maintenant ce sont eux qui rougissent de moi. On ne doit penser qu’à servir Allah et qu’à lui obéir ».
Littérateur et savant de mérite, il se faisait remarquer à la fois par sa vaste érudition, son talent poétique, sa puissante mémoire, qui lui avait permis d’apprendre par cœur, en une seule séance, cent vert de l’Alfiya. C’est, disait-il, parce que le sens et les lettres dépendent les uns des autres, et que moi je ne dépends pas d’eux.
Ayant le don des miracles, il sera près de dix ans au sommet d’une colline, n’ayant ni vivres, ni argent, ni bétail, ni maison. Sa famille, cependant, ne manquait de rien ; il lui envoyait des vases couverts, dans lesquels elle trouvait tout ce qui lui était nécessaire.

Une nuit, Cheikh Mohammed Fadel entend des gémissements. Il s’informe, et on lui dit qu’ils proviennent d’une femme qui, enceinte pour la quatrième foi, n’avait jamais pu accoucher : chaque fois, il avait fallu, pour la sauver, tuer l’enfant et l’arracher membre par membre, à la suite de quoi la main du médecin se couvrait toujours de lèpre.
Maintenant son mari est résolu à divorcer si elle survit, et sa mère ne veut pas la remarier. Apportez-moi un aliment, ou simplement de l’eau, dit le Cheikh. – On lui donne du lait, sur lequel il prononce le Bismillah, et ordonne de le faire boire à la femme. Celle-ci accoucha sans difficulté d’un enfant mâle. Bien constitué, et elle a eu depuis plusieurs enfants dans des conditions normales.
D’après le manuscrit qui nous fournit ces détails, Cheikh Mohammed Fadel serait mort, âgé de 91 ans, le 10 moharrem 1286 (22 avril 1869), étant en état de pureté, après avoir fait ses ablutions et les prières du Maghreb et de l’Achâ, au lieu même où il était né et avait été élevé. (…)La veille, Allah lui avait parlé directement, qui lui avait dit à trois reprises : « Salut à toi, mon serviteur ! – Tu es le salut, de toi vient le salut, Maître du monde ! » fut la réponse. Levant les yeux au ciel, le Cheikh dit : « Voilà ce que nous ont promis Allah et le Prophète ; tous les deux sont sincères. » - Il adressa ensuite aux assistants quelques exhortations à la piété et s’éteignit paisiblement. »
(Il faut signaler que nous avons rectifié le commentateur colonial qui parle d’un songe alors qu’il s’agit d’un entretien  -d’autres écrits en attestent- d’une parole que le Seigneur lui avait adressé directement comme il L’avait fait pour le prophète Moïse, seydina Omar Ben Khattab, Ma’ruf al Karhi, Abu Yazid al Bistami etc. Incompréhension du texte  ou mauvaise foi ?

« Il faudrait des volumes pour raconter toutes les belles actions de Cheikh Mohammed Fadel, qui était bon, pieux et humain au-delà de toute expression, et aimait Allah par-dessus toute chose. 

(…)Muhammad Fâdil n’a pas écrit beaucoup d’ouvrage, c’est son fils Mâ al -Aynayn qui a pris en charge l’écriture et la diffusion de sa pensée en rédigeant plus de trois cents livres ; c’est, comme pour Socrate et Platon, le disciple qui nous a transmis la pensée du maître. »
Cette remarque trouve ses fondements chez Mâ al-‘Aynayn, dans ses ouvrages, surtout les premiers, comme Na’t-al-bidâyât et fâtiq ar-rutaq : le nom de Muhammad Fâdil, des extraits de ses écrits, certaines de ses paroles y sont régulièrement cités. »

Dah  DIENG commente et traduit le poème du Cheikh qui donne des indications biographiques sur le le Cheikh du Hodh en ces termes :
« Chers et sœurs je partage avec vous ce beau poème de Cheikhna Cheikh Saadbouh en l’honneur de son père Cheikhna Cheikh Mouhammad Fadal would Mâmin (…). C’est parce que Cheikhna Cheikh Saadbouh, en bon poète, dresse ici le curriculum vitae de son vénéré père de manière extraordinaire. Je suis toujours ébahi en lisant ces vers. Puisse Dieu récompenser Cheikh Saadou Abihi pour tout ce qu’il nous a légué comme trésor. Amine. (….)
Je remercie beaucoup Cheikh Takhoulla would Dieh, pour la documentation et aussi à mon guide Cherif Idoumou pour la traduction et le commentaire du message.
Cheikhna Cheikh Saadbouh dit :
Qâla aboû abdoul azizi Sahdou
Abihi li llahi ta ‘alal khamdou
Tarîkhi cheikhina aboul mâmoûni
Wabnil amini zal houlâ mâmîni
Ghawsoul warâ mine batni oumihi baraz
Fî laylatil akhadi mine chahbâna kaz
Fî sâhati taasi ‘atil moubârakah
Fî hâzihi laylatil naalal barakah
Soumma ladâ sabgha sawâ-i’a ntaqal
Fî laylatil joumehati ilaa rabbil ajal
Mîladouhou kâna fî hâmi ‘ayrachine
Wa jaa-a houl mawtou fî bad-i wafrachine
Aw saa ladan nazehi bi kilmatayni
Rawâ-houmaa abna-ahou fîl khîni
Masjidoukoum adyâfoukoum iyâ koumou
Ane taqfaloû ‘ane dhayni bal iyâ koumou
Wa bahedazâ zakara laahoul ajal
Wa karrara rafîqal ahlâ lam yazal
qassalehou mine najelihil kirâmi
Ya khabbazâ tatehîrou wal ikerâmi
Khalîfatou cheikhî ma’al immami
Wa seydil hasseni zil houmaami
Wa ma-houmou- mou-allifou diyâ-i
Sammiyouhou sirâjoul awliyâ-i
Wa ad khaloûhou fî darîkhihil aghar
Fa naala ma lam yakoun naalehoû bachar
Maata chahîdoul khoubbi wa chahâdah
Lahoû jinaanoul khouldi wa ziyâdah
Lizâka fî darîkhihi tassarafâ
Wa amerahou ‘alaa qabiyyin maa khafâ
Aderâkahou rijaalou wa nissâ-ou
Absarahoul abîdou wal immâ-ou
Traduction
Le père d’Abdoul Aziz, Saadou abihi a dit : « Gloire à Dieu
Je raconte l’histoire de notre maitre, père de Mâmouni(1)
Fils de notre référence, le grand, le noble Mamîni
Le pôle de tous les individus, sorti de sa sainte mère
La nuit du dimanche le 27 du mois de Chahban(2)
A la neuvième heure de cette nuit de baraka(3)
Il nous a quitté à la septième heure de la nuit du vendredi(4)
Le 10 du mois Muharram(tamkharit).
Sa naissance correspond à l’année 1211 (de l’hégire)(5)
Sa disparition correspond à l’année 1286 (de l’hégire)(6)
A ses dernières heures il nous confia deux choses
Que nous ses fils, avons respecté jusqu’à ce jour :
Ne négligez pas vos mosquées, qu’elles soient vos demeures
Ne négligez pas vos hôtes, honorez les !
Après avoir insisté sur ces deux choses
Il commençait à prononcer le nom de Dieu
Et prononça rafîkhoul ‘alâ avant de rendre l’âme(7)
Les saints qui se sont occupé de sa toilette mortuaire sont :
Cheikhal khalifa, Cheikh Mouhammad Limam
Cheikh Hassana et celui qui a écrit Al Diyâ-i
Dont son homonyme est la lumière qui guide les grands saints(8)
Après cela la prière se fit et il entra dans sa dernière demeure
Dieu lui a accordé des faveurs qu’il n’a jamais données à personne :
Il a quitté ce monde avec amour (de Dieu) et confirmation de sa foi(9)
Sa demeure éternelle est le meilleur des paradis
Et d’autres faveurs dont nous hommes, nous ignorons
De sa tombe, il continuait les activités de son vivant
Et ceux qui ne l’ont pas connu ou cru ont été témoins de ces faits(10)
Ses serviteurs et disciples le voyaient souvent quitter sa tente et retourner dans sa tombe.
Alors que tout le monde savait qu’on l’avait jadis enterré.
Commentaires :
(1) Cheikhna Cheikh Saadbouh dit ici que c’est lui, père de Abdoul Aziz qui raconte l’histoire du père de Mamoun… et fils de Mâmîn. Mouhammadoul Mâmoun est fils de Cheikh Mouhammad Fadal et grand frère de Cheikh Saadbouh. Quand il était dans le Ntaba, dans ses premières heures Mouhamadoul Mamoun l’avait trouvé là-bas et avait assisté à sa confrontation avec les oulémas de cette région. Il est mort à la Mecque alors qu’il se rendait en pèlerinage ; dans « Khawâtim » Cheikhna Cheikh Saadbouh y raconte les circonstances extraordinaires de la mort de son grand frère. En effet, Mouhammadoul Mamouni, prononçait des paroles du Saint Coran au moment où on l’introduisait dans sa tombe.
(2) La nuit du dimanche signifie ici le samedi soir, pour les musulmans le jour se termine après le coucher du soleil. Cheikhna Cheikh Saadbouh a utilisé ici la science de la numération des lettres arabes, ici Kaz correspond à 27.
(3) La neuvième heure correspond ici à 04h du matin car si le coucher du soleil correspond à 19h du soir, de 19h à 00 heures il y a cinq heures de temps, plus les quatre heures cela fait neuf.
(4) La nuit du vendredi, selon le calendrier musulman, correspond à un jeudi, et la septième heure, à deux heures du matin.
(5) Ici également Cheikhna Cheikh Saadbouh a utilisé la méthode de numération des lettres arabes, ayrachine correspond à 1211.
(6) Idem que la remarque précédente.
(7) rafîkhoul ‘alâ : est l’expression que Le Prophète(PSL) avait prononcé quand il devait quitter ce monde et rejoindre Notre Seigneur. Ceci est une confirmation du degré de sainteté de Cheikh Mouhammad Vadal.
(8) L’auteur de « Diyâ Al Moustabîn fî karamat Cheikh Mouhammad Fädil ben Mâmîn » est Cheikh Mouhammad Fâdil would Lakhbîb, qui était un disciple de Cheikhna Cheikh Mouhammad Fâdil et aussi son neveu. Donc, l’homonyme dont parle Cheikh Saadbouh n’est personne d’autre que Cheikhna Mouhammad Fâdil, qui est la lanterne des saints.
(9) Cheikhna Cheikh Saadbouh raconte dans « Khawâtîm » que Cheikhna Mouhammad Fâdil est tombé malade après avoir reçu la salutation du Seigneur. Il est resté malade environ six mois et a fini par vomir un morceau de son foie qui s’est détérioré par amour de Dieu. La salutation du Seigneur : « Asalamou Aleyka Yâ ‘abdi » ce n’est pas une chose qu’un simple mortel pourrait entendre, seul un saint de la trempe de Cheikhna Mouhammad Fâdil pouvait avoir cette faveur. Et Cheikhna Cheikh Saadbouh dit que toutes les parties du corps humain entendent cette salutation, d’où l’intensité de la décharge.
(10) La confirmation de ce fait est Cheikh Aboul Anwar, venu au monde bien après le décès de son père. Mais la fille de Cheikh Talibouya would Cheikhna Cheikh Mouhammad Fâdil, Marième Abda, qui vivait dans l’entourage de Cheikh Saadbouh en était aussi une preuve vivante. Cheikhna Cheikh Saadbouh en regardant sa nièce disait que si vous voulez voir une personne du paradis regardez cette fille. Marième mint Cheikh Talibouya raconte qu’un matin, alors qu’elle était avec ses cousins et cousines, à l’âge de 08 ans, ils ont vu Cheikhna Mouhammad Fâdil quitter sa tente et retourner dans sa tombe. Ils ont couru pour le rejoindre et lorsqu’il s’est retourné il leur a donné des dattes. Marième Abda raconte que depuis qu’elle a mangé cette datte, aucun autre aliment n’avait de goût pour elle. A chaque fois qu’elle mangeait, c’était la saveur de cette datte et ce durant plus de 80 ans.
Cheikh Talibouya would Cheikh Mouhammad Fâdil est l’homonyme de Cheikh Talibouya fils de Cheikh Saadbouh, il était enterré à Saint-Louis du Sénégal avec Mouhammed Lemine would Ainsseu. Et dont les corps ont été rapatriés par Cheikh Déthialaw, Cheikh Ahmadou Makhtar Diop et d’autres disciples. Certains des petit- fils de cheikh Talibouya se trouvent au Maroc.
Sa fille Marième Abda avait épousé Dieh Al Mouhtar would Cheikh Mouhammad Limam et de cette union est née une fille du nom de Tarbana.
Les circonstances qui ont fait que Cheikhna Cheikh Tourad would Abbas a composé un poème d’éloge à Cheikhna Cheikh Mouhammad Fâdil sont aussi une preuve de ce que Cheikhna Cheikh Saadbouh relate.
La vision de Cheikh Sidyl khayr, lorsqu’il devait se rendre chez son grand frère Cheikh Saadbouh, est aussi une preuve de la présence de Cheikhna Cheikh Mouhammad Fâdil autour de sa famille et de ses disciples. »
CHEIKH TALIBOUYA NIANG ET DAH DIENG

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